Communiqué du 04 Mai 2020

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Communiqué rédigé le 04 mai 2020

Vers une construction progressive des transferts de joueurs dans l’esport ?

Sujet proposé aux Représentants du Comité des Clubs le 4 mai 2020

L’équipe Esport Agora a construit ses recherches sur la législation française sur l’esport en vigueur au 04/05/2020, ainsi que sur les statuts et règlements de la FIFA et la FFF.

Comparaison entre Joueurs Esport et Joueurs de Football

Esport

Statut de Joueur Professionnel
Fédération Nationale officielle
Fédération Internationale officielle
Ligues Nationales officielles

Football

Statut de Joueur Professionnel
Fédération Nationale officielle
Fédération Internationale officielle
Ligues Nationales officielles

Que disent la FFF et la FIFA sur le statut des joueurs amateurs rémunérés (Contrat Fédéral) ?

Voir Statuts du Joueur Fédéral

Voir Règlements Généraux de la FFF

La Licence

Pour pouvoir participer à ce que la FIFA appelle le Football Organisé, les joueurs doivent s’acquitter d’une licence auprès de leur « association » locale : les fédération nationales.

En France, il est obligatoire de renouveler sa licence pour chaque saison au sein de son club pour y exercer une activité.

Pour pouvoir prendre part aux activités officielles organisées par la Fédération, la L.F.P., les Ligues régionales, les Districts ou les clubs affiliés, tout joueur, dirigeant, éducateur ou arbitre doit être titulaire d’une licence pour son club régulièrement établie au titre de la saison en cours.

Règlements Généraux de la FFF 2019-2020, Titre 2, Article 59

Les Ligues

En France, la construction du joueur amateur comme joueur rémunéré repose sur le Contrat de Joueur Fédéral.

Ce type de contrat est attribué et/ou attribuable aux clubs de football français selon la division dans laquelle ils exercent.

Seuls les clubs n’ayant pas le statut professionnel, au sens du Règlement Administratif de la L.F.P., qui participent au Championnat National 1, dits clubs indépendants, au Championnat National 2, au Championnat National 3, au Championnat Régional 1 et au championnat de la division supérieure de la Ligue de la Réunion sont autorisés à utiliser des joueurs sous contrat fédéral dans l’équipe première du club.

Statuts du Joueur fédéral 2019-2020 , chapitre 1 article 1, FFF

Le contrat

Le contrôle du respect des obligations fédérales dépend est régi par la Commission Fédérale du Statut du Joueur.

Elle est compétente pour procéder à l’homologation des contrats et avenants des joueurs fédéraux et joueuses fédérales, à la validation des reclassements amateurs, ainsi qu’à l’enregistrement des mutations temporaires, dans les conditions prévues aux Statuts du Joueur et de la Joueuse Fédéral(e).

STATUTS DU JOUEUR FÉDÉRAL 2019-2020 , CHAPITRE 1 Préambule, FFF

Ces contrats fédéraux prennent la forme de Contrats à Durées Déterminées par saison, pouvant être à temps partiel s’ils représentent plus de 60% de l’activité économique du joueur.

Tout avenant au contrat fédéral doit être homologué par la Commission. Aussi, si les Statuts de Joueur Fédéral n’interdisent pas les ruptures anticipées de contrat, il est nécessaire de faire homologuer tout avenant de rupture.

Les transferts nationaux

Le principe de changement de club est assez simple à l’échelle nationale en France :

Tout joueur désirant changer de club doit, sous couvert de son nouveau club, remplir un formulaire de demande de licence.

Règlements généraux de la FFF 2019-2020 , chapitre 4 article 90

Une meilleure compréhension du processus de transfert

En examinant les règlements spécifiques à la FIFA et au Football, on comprend très vite que les processus de transferts dans le monde sportif ne s’opèrent pas en « rachat » de contrat comme on peut souvent l’entendre.

Il s’agit en effet de résilier dans un premier temps le contrat liant un joueur à son club, puis, de signer avec le nouveau club.

Pour un club souhaitant acquérir un joueur jouant sous les couleurs d’une autre organisation, il est nécessaire de réaliser deux négociations en parallèle :

Négociation avec le Club
  • Identifier les clauses de ruptures du contrat
  • Payer les clauses libératoires
Négociation avec le Joueur
  • Connaître les besoins du Joueur
  • Réaliser une offre de contrat

La rédaction de clauses libératoires est donc un élément majeur de la réalisation des transferts dans l’esport.

Mais au delà des bases juridiques, les nombreux freins actuels sur la scène empêchent la construction d’une scène d’échanges fiables entre clubs.


Esport : Construire une base éthique aujourd’hui pour faciliter le développement légal de demain

La loi pour une République Numérique de 2016 a marqué un grand coup en créant les premières lois « esport » en France.

En faisant ainsi, les autorités ont décidé qu’en l’absence de fédération ou d’acteur de confiance sur la scène, l’Etat se chargerait d’arbitrer par différents moyens la contractualisation des joueurs compétitifs de jeux vidéos, ainsi que le déroulement des compétitions.

Il est donc nécessaire pour les clubs esport de construire, en s’appuyant et en respectant sur ces règles, une base éthique sur la scène qui permettra, plus tard, à un acteur fédérateur de s’y appuyer.

Il serait aujourd’hui insensé de vouloir inciter les Représentants des Clubs à construire une économie sur le transfert de joueurs, quand une grande partie des départs actuels de joueurs amateurs se font sans discussion préalable avec leur propre club.


Qu’en pensent les Représentants ?

Le sujet ayant été soumis à discussion le lundi 4 mai, les Représentants des Clubs présents ont été amenés à exprimer leur opinion sur la construction des transferts dans l’esport. Plusieurs éléments particulièrement intéressants ont été relevés :

Il ne faut pas oublier aujourd’hui que différents éditeurs proposent eux-mêmes une régulation des transferts dans les compétitions qu’ils proposent. Riot Games par exemple, sur leur jeu « League Of Legends » dans les compétitions type « LCS », « LFL ».

Ervin, Représentant de Club, Oserv Esport

Esport Agora : En effet, de nombreuses compétitions « longues », notamment sous la forme de ligue, appliquent généralement des règles très strictes vis à vis des changements d’équipes. Mais le fait de voir un éditeur s’impliquer dans la gestion et limitation des transferts -bien qu’il ne soit aujourd’hui pas parfait selon les participants- montre que tous les acteurs de la scène voient dans le flux des joueurs un élément naturel.
Pour continuer sur l’exemple de la LFL proposée par League Of Legends et en observant son règlement, un contrôle similaire à celui des Commissions de la FFF est appliqué vis à vis des transferts : « Les échanges doivent être soumis au moins cinq (5) jours ouvrés avant à l’Organisateur et Riot afin d’approuver l’échange. Les échanges doivent être approuvées par Riot avant d’être validés. »
Il est donc intéressant de voir, à travers le jeu League Of Legends, que les éditeurs cherchent à se placer naturellement comme organe de contrôle de leur propre jeu, là ou une autorité indépendante exerce dans les fédérations sportives.

D’un point de vue droit, les disparités en matière de traitement des joueurs de la scène sur différents niveaux ne constitueraient-elles pas un élément de développement inégalitaire des différents clubs vis-à-vis des transferts avec transaction financière?

JokosGD, Représentant de Club, Prophecy Esport

Esport Agora : Les inégalités de niveaux et de moyens risquent inévitablement à court terme d’accentuer le gouffre entre les clubs amateurs et clubs professionnels dans le cas d’une démocratisation des transferts avec transaction financière, et ce principalement pour des questions de contractualisation différente selon les clubs de l’activité de leurs joueurs.
Les clubs esport sous formes associatives sont nombreux sur la scène esport et constituent un fer de lance vital au développement de l’esport : sans associatif, pas de préformation ni de formation de joueurs. L’élément principal permettant leur survie sur la scène est leur possibilité de recourir à des conventions de bénévolats avec leurs joueurs : ceux-ci acceptent de représenter leur club sans contrepartie financière. Mais l’élément de droit permettant aujourd’hui d’assurer des protection vis à vis des départs inopinés de joueurs -et donc des transferts- repose principalement sur ce qu’on appelle les clauses de dédits, qui sont une forme de clause libératoire. Or, il n’est pas possible de mettre en place une clause libératoire pour des joueurs bénévoles, étant contraire au principe même du bénévolat. Cette masse de clubs associatifs ne pourra donc pas bénéficier des transferts avec contrepartie financière, dans le cas d’une généralisation et d’une régulation de ceux-ci.
Restons néanmoins optimistes sur la question : ce problème n’est pas que réservé à l’esport. Il a été en effet la source de nombreux débats dans le football, si bien que la FIFA a décidé de mettre en place une indemnité de formation accompagnée d’un mécanisme de solidarité dans le cadre des transferts de joueurs professionnels :  » Si un joueur professionnel est transféré avant l’échéance de son contrat, tout club ayant participé à la formation et à l’éducation du joueur recevra une proportion de l’indemnité versée à l’ancien club (contribution de solidarité) ».
Suivant ce mécanisme là, tout club ayant participé à la formation d’un joueur avant ses 23 ans reçoit une indemnité lors du transfert de celui-ci vers un club professionnel. Cela permet donc aux différents clubs de niveau différent de subsister grâce aux transferts à l’échelle professionnelle. Il est donc envisageable qu’un mécanisme similaire puisse s’appliquer dans un futur plus ou moins proche sur la scène esport, diminuant légèrement les inégalités issues des transferts sur la scène.

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